
Pour le neuvième jour de mon noël, je vais vous raconter l’histoire du bonnet pour enfant que j’ai trimballé dans mes affaires pendant 41 ans.
J’ai acheté ce petit bonnet en 1980, à Québec, lors d’un voyage avec l’ensemble vocal dont je faisais partie. Nous chantions au festival d’été pendant une semaine au Grand Théâtre avec plusieurs grands artistes de l’époque.Pendant le spectacle d’environ deux heures, j’avais un mini solo de deux phrases dont j’étais un peu trop fière. J'étais emballée par ce voyage, tout d'abord parce que je n’avais jamais voyagé sans mes parents mais surtout parce que j’avais l’impression d’être une superstar en tournée dans la Vieille Capitale.
Le matin nous avions des répétitions en salle mais les après-midi étaient consacrés à la visite de la ville. Je me souviens encore de la chorégraphie que nous avons faite à la citadelle essayant de faire rire le soldat de la garde en chantant un extrait de l’opéra de de Carmen ;
Avec la garde montante
nous arrivons, nous voilà !
Sonne, trompette éclatante !
Ta ra ta ta ta ra ta ta.
Nous marchons la tête haute
Comme de petits soldats,
Marquant, sans faire de faute,
Une, deux, marquant le pas.
Les épaules en arrière
Et la poitrine en dehors,
Les bras de cette manière,
Tombant tout le long du corps.
Avec la garde montante
Nous arrivons, nous voilà !
Sonne, trompette éclatante !
Ta ra ta ta ta ra ta ta.
La semaine tirait à sa fin et on nous a finalement emmenés faire les boutiques pour ramener quelques souvenirs. Je n’ai pas acheté de carte postale ni de drapeau. Je n’ai pas pris non plus de peluche ou de t-shirt. J’ai trouvé dans une boutique d’artisanat un petit bonnet fait d’une fine laine rose. Il était hors de prix et j’y ai passé tous mes sous. Mais je pensais à ma mère, à la maison, qui était enceinte de ma petite sœur et c’est tout ce qui comptait pour moi, en ce moment précis.
Ma petite sœur est née quelques semaines plus tard et, malheureusement, sans même que je puisse la voir, elle est morte. Je ne lui ai jamais donné son petit bonnet rose.
Les premières années qui ont suivi sa naissance, je gardais mon précieux souvenir dans les tiroirs de ma commode et, de temps à autre, je tombais dessus et je le glissait sur ma joue, pensant à cette petite fille que je n’ai jamais connue. Et les années ont passé. Le petit bonnet était quelque part dans une caisse avec mes vêtements d’hiver ou d’été. Alors deux fois par année, je le retrouvais et je repensais à elle, au chagrin de ma mère. Je le serrais contre moi quelques instants et je le remettais à sa place. Et puis un jour, devenue mère à mon tour, le petit bonnet a rejoint la caisse d’albums photos et de souvenirs de toute sorte.
Ce bonnet, c’était Québec, c’était ma sœur, c’était ma mère effondrée, c’était mon chagrin à moi. C’était la mémoire d’un évènement important, le genre de moment marquant ou il y a un avant et un après.
Cette année, un peu avant Noël, un certain soir de nostalgie, j’ai sorti les albums photo. Et j’ai retrouvé le petit bonnet rose, intact. Pour la dernière fois, je l’ai glissé sur ma joue et je l’ai mis dans la pile des objets à donner. Il est temps, plus que temps. Un jour peut-être, je croiserai un poupon dans sa poussette avec un petit bonnet rose et je me rappellerai Québec.
Voici donc ma recette de bonnets.
Tourte de veau braisé aux oignons et à l'ail confit
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